Billet d'humeur de la semaine - Lundi 11 Décembre 2023
Les personnels des urgences de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, plus grand hôpital d’Europe, se sont mis en grève avec la CGT pour réclamer des moyens humains et matériels afin de pouvoir soigner correctement leurs patients.
En effet, le manque chronique de soignants avec des planning à trous, l’absence de lits disponibles pour hospitaliser les patients et le matériel insuffisant tant en quantité qu’en qualité n’étaient plus supportables.
Une première marque de mépris s’est manifestée par l’absence de réaction de la direction face au préavis de grève, qui n’a pas assigné le personnel prévu sur le planning pour assurer la continuité de fonctionnement du service le jour de début du mouvement.
Conséquence, il a fallu demander au personnel de nuit de rester en poste après ses dix heures de travail. Bref, cela a mis immédiatement l’hôpital sous tension. Cette incompétence de la direction de l’établissement a permis d’exercer une pression immédiate pour engager des négociations car le cabinet du ministre de la santé a été informé de la gravité de la situation.
Résultat ; une victoire éclair en un peu plus de 24 h.
Les acquis sont conséquents mais il est utile de mettre en avant deux éléments qui montrent que le problème de fond n’est pas uniquement le déficit en soignants comme l’avancent en permanence les directions et les ministres de la santé successifs, mais bien les problèmes financiers.
En effet, comment expliquer qu’une des revendications porte sur le nombre insuffisant de brancards disponibles et sur l’état déplorable de ceux en service.
Est-ce si difficile que cela d’acheter des brancards ?
Plus grave est le refus de la direction d’embaucher des agents de service hospitaliers (ASH) pour soulager le travail des aides-soignantes et des infirmières. La réponse a été que la politique actuelle était de ne plus faire appel à cette catégorie d’emploi car il était très difficile de trouver des candidats.
Des personnels non qualifiés nécessaires mais remplacés par des sociétés privées ne répondant pas aux besoins.
Faisant partie des responsables syndicaux présents pour accompagner la négociation, j’ai souligné le fait que ces personnels non qualifiés qui étaient en nombre auparavant à l’hôpital avaient été remplacés, notamment pour effectuer le ménage, par des entreprises sous-traitantes qui ne répondaient pas aux besoins.
Que par ailleurs ces agents pouvaient assurer des tâches de logistique, de sécurité, d’entretien, actuellement effectuées par les soignants qui étaient déjà débordés. Il a été également souligné que le président de la République lui-même nous avait expliqué qu’il suffisait de traverser la rue pour trouver des personnes à embaucher pour ce type d’emploi. Là aussi, la véritable raison imposée aux directions des hôpitaux est de supprimer cette catégorie de personnel pour la remplacer par des contrats de sous-traitance, afin de diminuer les coûts en utilisant des entreprises qui sous-payent et exploitent honteusement leurs salariés.
Cette première victoire a permis d’obtenir des moyens supplémentaires immédiatement mais la bataille n’est pas terminée. Un comité de suivi a été obtenu et les salariés avec leur syndicat CGT reviendront à la charge très rapidement pour notamment faire sauter ce verrou et embaucher des ASH.
Dr Christophe Prudhomme